Délégation et/ou subsidiarité, que choisir ?

L’explosion des technologies et la transition numérique provoquent des changements culturels considérables avec des effets très perceptibles sur le rapport au travail et l’émergence de nouveaux modes d’organisation.

Les dirigeants, qui majoritairement se sont développés professionnellement dans un mode de management top down, rencontrent les nouvelles générations de salariés qui aspirent à plus d’autonomie et plus d’initiative.

Ces dirigeants, par conviction ou nécessité, veulent faire évoluer la culture managériale de leur entreprise, mais ne sont pas toujours au clair sur la manière de s’y prendre.

On entend de plus en plus évoquer le principe de la subsidiarité dans les entreprises. Notamment dans les entreprises qui choisissent de pousser la collaboration et l’autonomie. De quoi parle t’on ?

 

Est-ce que la subsidiarité serait la délégation poussée à son maximum ?

La réponse est non, car si la manière de construire l’une et l’autre sont très proches, délégation et subsidiarité reposent sur des principes opposés.

Ce qui est commun entre la délégation et la subsidiarité, c’est la volonté d’organiser le partage des rôles et des responsabilités.

Ce qui les distingue, concerne le rapport au pouvoir, notamment chez les dirigeants.

Avec la délégation, on cale le management sur une réalité juridique : le pouvoir est dans les mains de ceux qui ont la responsabilité juridique de l’entreprise même si on organise sa répartition de haut en bas. Pouvoir et responsabilité restent indissociablement liés.

Dans la subsidiarité, celui qui assume la responsabilité juridique ultime considère que par nature, le pouvoir est dans les mains de tous ceux qui agissent, chacun à son niveau.

La délégation

La délégation se construit de haut en bas. On part de la responsabilité du dirigeant, qui va déléguer ses projets, fonctions et tâches à ses n-1. Ils fixent ensemble des objectifs à atteindre et mettent en place, de façon tacite un contrat de délégation. Les n-1 agissant à leur tour de la même façon vis à vis des n-2. Ce processus se répète de haut en bas de l’organisation de l’entreprise. Chaque échelon hiérarchique apporte son soutien aux échelons subordonnés et attend d’eux un reporting.

 

Le principe de délégation

La subsidiarité

La subsidiarité se construit de bas en haut. On considère que par principe, chaque personne en charge d’une mission confiée dispose de toute la marge d’autonomie pour mener à bien cette mission et donc du pouvoir de décider et d’agir (à condition bien sûr qu’elle soit informée, formée et outillée pour sa mission). Elle dispose de toute la marge d’autonomie…sauf pour des décisions et actions qui pourraient avec un impact sur un périmètre plus large et qui seront donc prises et engagées à un échelon supérieur.

Dans ce modèle fondé sur la subsidiarité, on commence par définir et répartir les missions, et on se contente de fixer pour chacune les limites de l’autonomie (tout sauf…).

Ne reviennent au dirigeant que les décisions qui n’ont pu être traitées par d’autres, compte tenu de leur impact très global.

Cela suppose pour le dirigeant un réel changement de posture managériale. Assumer la responsabilité ultime tout en reconnaissant pour les autres le pouvoir de décider et d’agir dans le champ de leurs missions suppose de faire le choix de la confiance. Et faire confiance comprend sa part de risque.

Le dirigeant n’est donc plus celui qui décide de tout et qui contrôle tout, il devient le gardien du sens, des valeurs et du cap qui a été fixé. Cette confiance favorise l’engagement et l’autonomie des collaborateurs. Une des vertus de la subsidiarité est de favoriser la transversalité entre personnes et entre équipes.

Le principe de subsidiarité

Est-on amené à devoir choisir entre délégation et subsidiarité ?

Oui sur le plan de la culture managériale car la subsidiarité n’est pas la délégation poussée l’extrême. C’est un autre modèle. (C’est d’ailleurs un modèle qui peut toucher ses limites en période de crise : dans la tempête, le dirigeant doit souvent reprendre la barre.) On parle aussi de management par le vide.

 

Néanmoins, dans les entreprises qui fondent leur culture managériale sur la subsidiarité, certains sujets sensibles au risque tels que la sécurité au travail par exemple nécessitent d’être organisés sur le modèle d’une délégation pure et dure.

 

– Bruno TESSON –

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